Vous ne nous trouverez pas ! [ PV Arya ]

Élise venait juste de finir de se changer, après son cours de danse. Celui-ci avait duré, comme toutes les autres fois, environ une heure et demi, si on retirait les trente minutes d’échauffements, nécessaire pour éviter de se faire un claquage. Mais cela ne lui arrivait que rarement, car elle prenait bien soin de s'échauffer comme il se devait.

Bon après, c'était encore une fois le cours de langues étrangères. Et cela, elle ne le supportait pas plus que les mathématiques. Enfin, supportait était un bien grand mot. Tout dépendait de ses humeurs. Mais là, elle n'était pas d'humeur à participer à ce cours. Et elle avait préparé, une fois de plus, une petite fugue. Sauf que cette fois ci, elle allait emmener Arya, sa fidèle servante, qu'elle considérait plus comme une grande sœur qu'autre chose.

Elle plia ses affaires de danse, puis les laissa dans la salle de bain. C'était ici qu'elle se changeait, avant de prendre un bon bain, le plus souvent. Sauf que là...elle n'allait pas prendre son bain. Elle allait s'enfuir. Mais...pas par la fenêtre, comme elle le faisait d'habitude. C'était beaucoup trop haut, surtout que sa salle de bain était au deuxième étage. Se suicider reviendrait à la même chose. Elle allait juste passer par la porte d'entrée en évitant de se faire remarquer. Mais elle aurait besoin d'Arya pour cela. Car si quelqu'un arrivait, cette dernière aurait juste à occuper le serviteur pendant qu'elle même passerait discrètement. Dans ce cas là, elles se retrouveraient un peu plus tard, en face du portail du jardin. D'ailleurs, la jeune fille avait également prévu de se cacher dans le jardin si elles étaient repérées. En effet, ce dernier était gigantesque, il faisait au moins deux fois son manoir, et, même occupé comme il l'était pas les jardiniers, c'était un vrai labyrinthe. Labyrinthe qu'elle connaissait par cœur, à force de s'y aventurer...

Elle ouvrit le robinet de la salle de bain, et laissa l'eau y couler. Et cette eau, elle allait la laisser couleur pendant qu'elle partirait. Même si cela allait augmenter la facture, cela valait le coup. Non seulement on penserait qu'elle serait dans la pièce, mais, en plus, lorsqu'on se rendrait compte qu'elle n'y était pas, ce serait trop tard, la salle serait inondée. Et cela pourrait occuper la plupart des serviteurs, les empêchant de partir à sa poursuite. Cela lui serrait avantageux, car, au moins,La noble ouvrit lentement la porte, et regarda de chaque côtés du couloir. Personne en vue, c'était parfait. Elle sortit, puis referma derrière elle cette même porte, aussi silencieusement que possible. Elle marcha ensuite à pas de loup en direction de la chambre d'Arya. En temps normal, les servantes et serviteurs n'en avaient pas, mais elle, elle était différente, aux yeux d’Élise. Cette dernière avait finit par réussir à convaincre sa fidèle servant d'accepter cet honneur, ainsi que son père de lui accorder ce privilège. Évidement, ce n'était pas aussi confortable qu'elle l'aurait voulu, mais c'était mieux que rien.

Elle toqua très légèrement à la porte, puis chuchota :

"Arya ?"

La servante des Studienne revenait des cuisines avec un plat dans la main. Comme chaque matin, elle préparait le repas de Mademoiselle Élise. Elle lui avait préparé des gaufres, plat qu'elle adorait tant. Mais elle savait que sa maîtresse ne les mangerait pas tout de suite. En effet, elle devait à peine sortir de son cours de danse, et devait être dans la salle de bain. Puis, elle aurait dû enchaîner sur un cours de langue. Arya ne savait plus si elle apprenait le français, l'allemand, ou l'italien, mais ce dont elle était sûre, c'était que ces cours devenaient de plus en plus insupportables pour la jeune fille. Mais elle la comprenait, car une ou deux fois, elle avait assisté à un cour, et s'était endormi au bout d'une demi-heure. Les cours que la jeune fille avait étaient bien ennuyeux. Pire que n'importe quelle berceuse ou somnifère. Pourtant, la Vargas avait elle aussi reçu des cours quand elle vivait encore en Italie. Mais jamais elle ne s'était ennuyée ; elle apprenait la musique avec son violon, la peinture, la littérature... Peut être était-ce moins important, mais au moins, elle ne s'ennuyait pas à mourir comme Élise. Et c'était ça la cause de ses nombreuses fugues. Elle en était persuadée. Si ses cours devenaient intéressants, elle n'aurait sûrement plus aucune envie à fuir. Et quand mademoiselle fuguait, la faute retombait souvent sur la pauvre Arya, qui était censée veiller sur elle. Elle ne suivait jamais Élise dans ses fuites, sinon, elle aurait été virée. Mais celle-ci l'avait tellement supplié que la Vargas avait accepté.

Elle alla déposer son plateau rempli de gaufres appétissantes, saupoudrées de sucre glace, dans la salle, et remonta dans sa chambre. Le plan de fuite était simple : elles passeraient par la porte d'entrée, et si quelqu'un arrivait, la servante devait faire diversion pendant qu'elle partirait. Élise avait tout prévu, car elle laisserait l'eau de son bain couler, pour occuper le plus possible tous les domestiques. Normalement, la jeune fille ne tarderait pas à arriver. Effectivement, deux minutes plus tard, on frappa à la porte, et une voix chuchota :

" Arya ? "
« - Oui, j'arrive ! » répondit la jeune fille à voix basse.

Elle sortit de la chambre sur la pointe des pieds pour éviter que le plancher ne grince. La jeune fille sourit à sa maîtresse, ses fossettes grêlées de tâches de rousseur. Elle avait enfilé une robe qu’Élise lui avait prêté, pour passer inaperçu en ville, et portait une cape sobre par-dessus. L'hiver était là, et pas question pour elle de tomber malade. Sous ses airs fragiles, elle était plutôt résistante. Elle avançait derrière la fugueuse, et elles arrivèrent devant la porte d'entrée. Hélas, comme elles l'avaient prévu, deux domestiques traînaient dans le hall d'entrée.

« - Bon, Mademoiselle Élise, je crois que c'est à moi de jouer... »

Arya se dirigea donc vers les deux gêneurs pour faire champ libre à Élise. Elle se mit à leur expliquer qu'elle avait besoin d'argent pour aller chercher du pain, et qu'elle avait perdu celui que le père de sa maîtresse lui avait donné. Elle espérait que sa diversion permettrait à la jeune fille de s'enfuir d'ici, et dès qu'elle serait sorti, elle irait la rejoindre. Enfin, si tout ce passait bien...